Last updated on 10 mars 2021
Bienvenue au Museo Ferruccio Lamborghini : une vision plus familiale, centrée sur l’homme qui a donné naissance à cette marque mythique : des modèles inédits, souvent uniques et une présentation détaillée des différentes activités de cet entrepreneur audacieux. Le tout raconté par son neveu, Fabio… Expérience inoubliable !
D’un coté, le musée Automobili Lamborghini de Sant’Agata (lire mon article ici). De l’autre, le musée Ferruccio Lamborghini de Dosso. Le musée « officiel » et le musée « officieux » serait on tenté de dire. Mais ces deux lieux à la gloire de Lamborghini se distinguent sur tellement de points qu’il est impossible de les comparer. Néanmoins, en y faisant bien attention, le nom de chacun des musées énonce clairement ce qui les rend unique l’un et l’autre. Tandis que le premier s’intéresse aux voitures Lamborghini et est géré par la marque, le second, dédié à son fondateur Ferruccio et à toutes ses activités/entreprises, est la propriété de son fils Tonino. Découvert par hasard en surfant sur internet, la visite de ce musée fut pour moi le point culminant de mon pèlerinage sur les traces de Ferrari et Lamborghini.
Commençons par quelques informations pratiques : la visite s’effectue uniquement sur rendez-vous car … le musée n’est pas ouvert en permanence. En effet, le directeur du musée, votre guide, viens spécialement pour vous ! Autant dire que c’est un peu intimidé que l’on rentre dans ce lieu, d’autant que notre guide s’appelle Fabio Lamborghini, neveu du fondateur Ferruccio Lamborghini. Cela ajoute une légitimité, un coté sentimental et affectif qu’ aucun des autres musées – Ferrari et Lamborghini – ne peut revendiquer.
L’homme d’une cinquantaine d’années connait son musée sur le bout des doigts et la visite est parfaitement organisée, suivant l’ordre chronologique. Fabio n’ hésite pas à vous parler directement, vous interpeller, vous montrer un détail de-ci de-là suivant votre regard. Pas trop techniques, sans pour autant être superficielles, les explications rendent compte du talent et des aspirations de Ferruccio. Ajoutées à la fierté italienne quand il s’agit de la famille, les grands gestes, le charisme et la grandiloquence de votre guide et vous serez complètement transportés dans l’univers de son oncle.
Ferruccio Lamborghini, industriel à succès
Voici les principaux objets du musée, en essayant au maximum de respecter l’ordre de la visite. On commence par un tracteur, nécessairement. Le premier tracteur « Low cost », fabriqué dans le garage familial, utilisant des matériaux de récupération et des moteurs anglais Morris –initialement destinés à des fins militaires – achetés à bas prix à la fin de la seconde guerre mondiale.
On passe ensuite à la première voiture que Ferruccio se construisit. Parti sur la Fiat Topolino –l’ancêtre de la Fiat 500, il fera passer son engin de 70 à 160 km/h en vitesse maxi en travaillant sur le moteur et en créant une carrosserie type barchetta. Il participera même aux Mille Miglia en 1948. Il va sans dire qu’il s’agit d’un modèle unique.
La visite se poursuit avec les différents tracteurs. Toujours avec des moteurs Morris, puis avec des moteurs allemands dont il acheta la licence avant de créer les siens. Fabio attirera notre attention sur le design élégant des tracteurs et surtout sur une première mondiale : un tracteur jaune, le troisième en partant du 1er plan. Etonnant mais on doit accorder à Lamborghini d’avoir introduit de la couleur dans les prés !
Arrivant au fond du musée, on aborde les activités « annexes » dans lesquels s’est lancé Lamborghini : chaudières, climatiseurs, pompes et même une voiturette à moteur qu’il fabriqua pour son fils Tonino. De nouveau des pièces uniques au monde !
On traverse tout le musée pour aller jusqu’aux autres tracteurs, des années ’60 et ’70, toujours en louant le design novateur et élégant, sans oublier les innovations techniques remarquables qui en faisaient bien évidemment les meilleurs tracteurs du monde !
On passe rapidement sur les immenses succès des moteurs Lamborghini en compétition offshore pour s’arrêter un instant sur le moteur de F1. Faisant l’éloge des premiers pas de Lamborghini en tant qu’écurie qui recueillit 15 points lors de sa seconde saison et même un podium en ’90.
Il nous raconta par ailleurs une anecdote dont j’étais loin de me douter. Lamborghini fourni quelques V12 de F1 à McLaren en ’93 pour effectuer des tests en vue d’une collaboration les années suivantes. Selon Fabio, Ayrton Senna aurait trouvé le moteur fantastique, ayant battu le record de la piste d’Estoril de l’année précédente. Il l’aurait certainement porté vers un avenir glorieux en F1. Finalement, aucun accord ne sera finalisé entre McLaren et Chrysler – propriétaire de Lamborghini à l’époque – et le projet tomba à l’eau (l’histoire en détail à lire ici). Avec des si … le passage de Lambo en F1 aurait pu être bien différent …
A l’autre bout du musée, deux véhicules atypiques. La première, une Papamobile – blanche bien sur! – offerte par Lamborghini à Jean Paul II pour ses déplacements dans l’enceinte du Vatican. D’ailleurs, le Pape actuel à aussi sa Lamborghini. Une course en Lambo dans les rues de la cité papale, ça vous tente ? A ses cotés, la Town Life – véhicule citadin électrique sans permis – de Tonino Lamborghini qui est actuellement commercialisée (ndlr : nous étions en 2009).
On finira par la création d’un hélicoptère, qui ne verra pas le jour pour de sombres raisons politico-financières. Néanmoins le prototype suspendu « nu » sans peinture est magnifique avec tous ses rivets !! Sans doute troublé … j’ai oublié de prendre une photo !
Cette partie méconnue des activités de Ferruccio Lamborghini – et de son fils – fut très intéressante mais le cœur de la visite reste la partie automobile à proprement parlé. Et nous ne serons pas déçus !
Automobili Lamborghini !
Nous arrivons à la tant attendue découverte des perles d’Automobili Lamborghini. Le récit commence bien sûr par l’anecdote de la dispute avec Enzo Ferrari. Connue et archi-connue ? Cette version en tout cas ne m’était pas venue aux oreilles. Ferruccio Lamborghini était devenu un homme d’affaires puissant et riche grâce à ses diverses entreprises. Il avait non pas une mais deux Ferrari, chose exceptionnelle s’il en était. Utilisant l’une d’entre elle au quotidien, il avait par deux fois dû se rendre à Maranello pour faire changer l’embrayage. Lorsque le même problème se présenta pour la troisième fois sur sa belle Ferrari 250 GT, Ferruccio décida de le réparer lui-même. Grand mécanicien, passionné, il adapta un embrayage de l’un de ces tracteurs sur sa Ferrari. Incroyable mais cela fonctionnait à la perfection avec une petite mise au point. C’est donc avec une certaine fierté qu’il se rendit à Maranello expliquer au Commendatore en personne quel était le problème et lui proposer son aide, étant donné que ses mécaniciens ne semblaient pas capables de le résoudre de manière définitive. Enzo ne voulu rien entendre et Ferruccio, sentant que cette discussion n’aboutira à rien de productif, reparti calmement en disant que dorénavant il se construirait lui-même ses propres voitures. On a donc là une version moins sanguine, moins théâtrale que le plus connu « Tu es peut-être doué pour fabriquer des tracteurs, mais surement pas pour conduire des Ferrari. Chacun son métier” . Qui pourra dire avec exactitude ce qu’il s’est réellement passé ? En tout cas, cette version permet à notre hôte d’exprimer l’admiration qu’il a pour Ferruccio et placer d’emblée l’homme au cœur de l’aventure mécanique.
Premier modèle de la visite : le prototype 350 GTV ! Il en existe 2 en réalité, celui-ci étant la toute première maquette tandis qu’un modèle roulant est la propriété d’un collectionneur japonais. Placé en face de l’entrée, ce proto avec ces lignes incroyables, impressionne le visiteur au premier regard.
La 350GT de série verra sa ligne modifiée selon des standards plus européen quand le concept avait quelque chose d’américain. C’est le modèle qui lui succéda – tout en restant très proche au niveau carrosserie – qui est présenté ici : une 400 GT, en version 2+2.
A coté de cette 400 GT, une Espada. Mais quelle est cette créature étrange qui lui fait face? Une autre pièce unique : le prototype de cette Espada. Vous remarquerez l’ouverture des portes papillons – sur une 4 place!! – qui fut abandonnée après des situations gênantes en ville. C’était tout de même moins extrême que la Marzal mais clairement inenvisageable dans la vraie vie. Impossible d’ouvrir la porte si une maudite Fiat 500 vous colle trop près ! Sans parler du poids …
Puisque nous sommes dans les pièces uniques restons y : nous nous trouvons à présent face à un prototype de Jalpa cabriolet. La différence majeure avec le modèle de série et sa carrosserie Targa est l’abandon du Hard Top amovible au profit d’une capote souple.
Direction maintenant ce qui pourrait être le lieu principal du musée: la Miura ayant appartenue à Ferruccio Lamborghini – une version SV qui aura gardé les cils des premières versions – et une Countach avec le kit aéro parfait. Splendides !!
Ensuite, nous retournons de l’autre coté du musée – même si en définitive ce dernier n’est pas très grand – pour admirer … de nouvelles pièces uniques. Sont réunis deux prototypes d’Urraco ainsi que le modèle commercialisé. Toute la chronologie du modèle : concept orange puis concept jaune et enfin série marron.
On finira par une curiosité : un engin blanc et jaune, capot en alu bouchonné, énorme lame à l’avant et aileron démesuré à l’arrière! Késako? Une version rallye de la Jarama réalisée pour un allemand qui voulait courir en Lamborghini ! 2 exemplaires au monde, celui ci ayant été racheté après sa carrière sportive. Notez les différences par rapport au modèle de série!
Arrivederci
Et voilà ! La visite du musée est terminée … ou presque. Fabio nous propose de monter à l’étage. C’est en effet d’en haut qu’on peut voir le bel hélicoptère construit par Ferruccio évoqué plus tôt. Ah si seulement j’avais pensé à faire une photo !
Ensuite, vu qu’il avait des choses administrative à régler, quartier libre dans le musée pour s’attarder sur les affiches, photos, objets exposés. Un petit mot sur le livre d’or pour s’apercevoir que les Australiens ont envahi la place ! Fabio confirmera qu’il ne voit que très très peu de français alors … ALLEZ Y !!!
La galerie bonus du Lamborghini Club France
Avant publication, j’ai transmis l’article au Lamborghini Club France pour relecture et détecter d’éventuelles contre vérité historiques. En réponse à mon message et en complément de quelques corrections, j’ai reçu des photos prises lors des différentes visites du Club à Sant’ Agata dans les années ’80. Ces images permettent d’illustrer les 3 vies d’un prototype. Ils sous tout d’abord mis sous les projecteurs des salons lors de leur présentation, avant de connaître une phase d’oubli… parfois suivi d’une résurrection dans un musée s’ils représentent un jalon important de l’histoire de la marque.
Ci-dessous, deux images très symboliques prises à l’usine Lamborghini en 1983. On y devine notamment 4 des protos que j’ai pu admirer au musée Ferruccio. De droite à gauche, sur la photo de dos : le proto Urraco Jaune qui servi au développement de la Silhouette, le proto Urraco orange, la 350 GTV absolument méconnaissable et le proto Espada avec ses immenses portes papillons. Suivent ensuite deux autres Urraco dont une version sensiblement « coursifiée » par Bob Wallace, le pilote essayeur de l’époque, avec de larges pneus taille basse.
Merci infiniment au Lamborghini Club France pour ces documents et leur confiance !
@ bientôt pour de nouvelles Aventures Automobiles !
Mon souvenir en 2021 :
Cette visite privée reste vraiment un moment inoubliable car se laisser conter l’histoire de la marque par un membre de la famille Lamborghini, au milieu de tous ces modèles rares fut vraiment un privilège ! Mon récit aurait pu être plus précis sur les différents modèles, les photos sont assez médiocres, mais j’ai pris le parti de garder mon compte-rendu tel que je l’ai écrit en 2009 pour conserver une certaine authenticité.
Depuis le musée à déménagé dans de nouveaux locaux : plus d’espace pour une mise en scène plus moderne et plus aérée … de quoi motiver une nouvelle visite lors de mon prochain voyage de l’autre côté des Alpes même si Fabio ne fait plus partie de l’équipe ! Voir le site du musée : Museo Ferruccio Lamborghini.
Et pour aller plus loin dans la découverte de Ferruccio et des débuts de son aventure automobile, voici une série d’interviews – en italien, sous-titré – de l’ingénieur Paolo Stanzani qui participa activement au développement de la Miura et la Countach ! Un récit plein d’humilité et d’anecdotes sur le plan technique mais également sur ses relations et la personnalité de Ferruccio. Emouvant et enrichissant !
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Il est bien cet article vintage J’adore la photo miura et countach ensemble et les éclairages de type musée.😍 Le ton du texte transpose ton attachement et ta passion pour la marque. On a des envies de visite à la fin de l’article 👍
Mission réussie alors, Merci Bruno ! 🙂
Un vrai reportage ! Et a peine vintage (surtout grace aux photos du club Lambo). Tu sais que tu pourrai publier tes photos et tes articles sur le net ? 😃 Personne ne va te challenger sur ton pseudo sur certain forum …
Pour tout dire, mon pseudo sur les divers forums a toujours été Ferruccio depuis près de 20 ans maintenant … et cet article est juste une mise à jour du compte rendu que j’avais publié à l’époque de ma visite sur un forum de miniature 1/18. 😀
L’ambiance de ce musée était assez unique (éclairage, modèles exposées …). C’est plus l’expo d’un collectionneur qu’un musée automobile. Tes photos, même si tu les trouves médiocres, participent à cette atmosphère que j’adore. Cet article me fait partager ta passion d’une façon que tu n’imagines pas car cela correspond à ma vision de « LA COLLECTION ». Merci.
C’est surtout côté technique que j’ai un œil critique sur les photos, mais effectivement elles participent à cette atmosphère vintage et intimiste. 👍 Quoi qu’il en soit, ça reste un merveilleux souvenir pour moi, et je suis bien content d’avoir pu transmettre cela au travers de l’article 😉